Amiens: « Moi aussi, j’ai eu 30 ans! », un autre regard sur les personnes âgées.
La photographe Anne D. Lefèvre recherche des retraités pour participer à son projet d’ouvrage » Moi aussi, j’ai eu 30 ans ! » , dans lequel ils raconteraient à quoi ressemblait leur vie à l’époque. Un autre regard posé sur les personnes âgées trop souvent invisibilisées.
C’est le genre de détail insignifiant pour beaucoup mais qui, elle, la fascine : voir cette vieille dame dans un magasin, une loupe à la main en train d’essayer de déchiffrer des prix ou une liste d’ingrédients ou une autre qui marche difficilement dans la rue, une canne à la main.
« À chaque fois, je me fais les mêmes réflexions. Je me dis qu’elles ont toutes eu mon âge un jour, qu’elles devaient très certainement courir partout et jongler, elles aussi, entre leur vie de femme active et leurs enfants. Je me demande toujours à quoi pouvait bien ressembler leur vie à 30 ou 40 ans…« , raconte Anne D. Lefèvre
» Le but n’est pas de dire que c’était mieux avant »
Un projet tout aussi photographique que sociologique, qui questionne notre regard sur les personnes âgées et sur la place que l’on veut bien leur laisser dans la société. « Je suis partie d’un constat, celui qui veut que l’on écoute beaucoup les enfants, que l’on parle d’eux et de leur éducation, on parle aussi beaucoup des actifs parce que tous occupent une place importante dans notre société. Mais une fois à la retraite, à cause de l’isolement et de la baisse de certaines capacités physiques, on n’entend plus, ou moins, leur discours. Je trouve cela dommage car elles ont tellement de choses à nous dire. Cette petite dame qui a aujourd’hui du mal à lire les prix au magasin a dû avoir une vie bien remplie elle aussi, faite de belles fêtes…« , assure la photographe pour qui l’objectif n’est pas de dire que c’était mieux avant.
« C’est surtout une occasion de remettre la personne âgée et son discours au même niveau que celui porté par les autres groupes d’âge. Et si cela peut donner envie à chacun d’entre nous de s’intéresser, dans notre propres familles, à ce que faisaient nos papis et nos mamies, tant mieux. »
« Il n’y a pas de vie banale »
Pour ce projet, Anne D. Lefèvre espère convaincre une vingtaine de retraités au moins chez lesquels elle se déplacera pour une discussion conviviale et quelques questions : quelle est la réalisation dont vous êtes le plus fier ? Quelle a été votre plus grosse fête ? Vos meilleures vacances ? Quel métier vous exerciez et quelle est votre vie aujourd’hui ?
» Certains n’oseront peut-être pas sauter le pas, estimant que leur vie a été trop classique. Je veux leur dire que dans chaque vie, il y a quelque chose d’intéressant à raconter, des souvenirs, des bons moments, il n’y a pas de vie banale. »
Ce projet n’étant pas financé, la photographe, qui réside à Bertangles, limite ses déplacements au seul département de la Somme. » Je ne demande évidemment aucune rémunération car il s’agit d’un projet artistique bénévole« , précise-t-elle.